Objectif : Expliquer un
calligramme (La mandoline l'oeillet
et le bambou)
« idéogrammes
lyriques » puis « calligramme » kallos (beau) et
gramma (lettre) en grec
Les origines d'un
calligramme : La dive bouteille de Rabelais (XVIe) est un
texte écrit en forme de bouteille par celui qui créa les géants
Pantagruel ou Gargantua.
Dans quel contexte
Apollinaire écrivait-il au début du XXe siècle ? ? Les
impressionnistes (peintres de l'époque) étaient fascinés par
le Japon : pays où des gravures, les estampes, intégrent dans
le dessin des idéogrammes ou calligraphies.
Comme prolongements
orientalistes, vous pouvez citer un poète français de la même
époque que « Guillaume » :
Paul Claudel
Cent phrases pour éventails
Voici des citations
de lui : « quelques mots débarrassés du harnais de la
syntaxe et rejoints à travers le blanc par leur seule
simultanéité » (préface de 1941)
« M est la
mer, la montagne, la main, la mesure, l'âme, l'identité. Et si
de toutes ces boucles et barres ajoutées nous formons un mot, quel
idéogramme plus parfait que cœur, œil, sœur, même, soi, rêve,
pied, toit, etc. ? Le mot chez nous qui signifie acquis par le
mouvement est un ensemble obtenu par une succession. Il vibre encore,
il émane encore dans cet arrêt du blanc qui le limite, l'allure de
la main qui l'a tracé. »
« Le poète
n'est plus seulement l'auteur, mais, comme le peintre, le spectateur
et le critique de son oeuvre »
La
mandoline l'oeillet et le bambou
Poème de la partie Etendards (après « La petite
Auto ») guerre déjà déclarée (p. 198 du recueil éditions
Pocket). L'étendard est un drapeau qui peut être associé à une
patrie ou un emblème personnel. Justement ces 3 objets semblent être
le blason, le symbole du poète.
Problématique possible pour tous les calligrammes :
Problématique possible pour tous les calligrammes :
La forme du poème-image coïncide-t-elle toujours avec le(ur) sens ?
Les mots clés de cette problématique sont la forme et le sens :
surtout n'en séparez pas l'étude. Vos axes de lecture analytiques
pourraient être :
Axe 1 :
lorsque forme et sens se font écho |
Axe 2 :
désaccords (discordances) entre sens et forme |
* 3 objets : Le titre annonce 3 éléments disposés dans le sens de lecture classique : de gauche à droite et de haut en bas mais l'inclinaison du bambou forme un triangle qui peut nous faire revenir au début dans le sens des aiguilles d'une montre. (c'est aussi le sens de lecture du corps de la mandoline) L'échelle n'est pas respectée et la fleur semble disproportionnée par rapport à l'instrument. Le poème le plus simple à lire est celui de l'oeillet, disposé à la verticale. (ici l'image est la version manuscrite mais dans la version imprimée c'est le bambou qui est horizontal ; du même coup, l'oeillet est en diagonale) Dans le texte on trouve en tête le mot oeillet et le mot odeurs justement dans le calice de la fleur. Au contraire le bambou et la mandoline ne sont pas nommés à l'intérieur du calligramme. En revanche on apprend que le bambou est en fait une « pipe » (à opium?) avec son « fourneau » et ses « odeurs » (comme la fleur) et les 3 O dessinent les nœuds du bois aussi bien que 3 ronds de fumée. Enfin, l'instrument de musique est perceptible par le sens de l'ouïe : « LE SON TRAVERSE la vérité » et il y a un jeu de mots sur l'homonyme : « comme une âme délire » car l'âme est une partie d'un violon et on pense aussi à la lyre, symbole de la poésie. |
* 3 symboles du poète : le lyrisme est l'expression de soi en poésie mais aussi la musicalité, l'association de sensations et de sentiments. Tout d'abord, dans le langage des fleurs, l'oeillet est le symbole des poètes. Le pronom personnel « je » nous invite aussi à lire le dessin comme un personnage. Dans la tête de la fleur, il y a le mot « cerveaux » et « subtiles » associés à l'esprit. Dans la tige de la fleur, on trouve des mots associés au corporel « nez » et « organes » mais cela se termine par une notion abstraite : « sagesse » La mandoline fait penser à la poésie du Moyen Age accompagnée d'instruments à cordes et la pipe à opium aux habitudes de certains poètes « maudits » du XIXe comme Baudelaire qui d'ailleurs a écrit un sonnet sur la pipe. Lorsqu'on lit les vers composant le bambou, on peut comprendre de multiples façons les ronds tels un « univers » ou les maillons de la « chaîne » « déliées » ou son contraire « lient ». Le fourneau et le verbe « forgent » nous mettent au cœur de la fabrication d'un poème objet (cf le dieu forgeron Héphaïstos forgeant un « trône » d'or et créateur d'objets magiques) Or l'objet mandoline nous force à changer notre lecture du poème dans le contexte de la guerre : « batailles » « comme la balle traverse le corps ». L'instrument de musique devient symboliquement un corps (ou une tête) transpercé par la ligne du manche « la terre tremble ». ou encore un cœur malheureux : « COMME LA BALLE A TRAVERS LE CORPS LE SON TRAVERSE la vérité car la RAISON C'est ton art femme » à cause d'une femme... |
En
conclusion : Les
dessins donnent un premier sens concret au poème mais peu à peu le
lecteur déchiffre le texte comme une énigme : difficulté à
lire car on ne sait dans quel sens prendre les mots et les phrases :
plusieurs sens de lecture. Mais il y a, de plus, plusieurs sens aux
mots du poème (polysémie). Ainsi précurseur des poètes et
peintres surréalistes (Apollinaire a inventé le mot en 1918) il est
également l'héritier des poètes symbolistes du XIXe siècle comme
Mallarmé,
avec ses poèmes si riches qu'ils en deviennent parfois impossibles à
comprendre : « Aboli
bibelot d'inanité sonore » :
poème objet, poème sonore, fragile comme un oeillet se fanant, un
son de mandoline retournant au silence ou un bambou parti en fumée...
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