lundi 8 janvier 2018

Une dissertation sur le théâtre

Préambule :
la dissertation ressemble en bien des points à d'autres exercices que vous connaissez :
nécessité d'organiser son devoir en introduction, développement et conclusion
la technique de l'introduction avec 3 étapes :amorce du thème abordé, une problématique liée à la question posée en consigne et l'annonce d'un plan en 2 ou 3 parties
enfin, la mise en place d'une argumentation solide avec des arguments justifiés (et non des opinions ou des affirmations gratuites) accompagnés d'exemples variés !

Question N°1 : à quoi ressemblent les sujets de dissertation ?
Sujets G
Le personnage romanesque dans Le Rouge et le Noir se construit-il exclusivement par son rapport à la réalité ? Vous appuierez votre réflexion sur le roman de Stendhal, sur les oeuvres que vous avez étudiées en parcours associé ou sur vos lectures personnelles.


 La poésie d'Apollinaire n'a -t-elle vocation qu'à célébrer la modernité ? Vous répondrez à cette question en vous fondant sur votre étude d'Alcools ainsi que sur les textes et les oeuvres que vous avez étudiées dans le cadre du parcours associé:  Modernité poétique ?

 Dans le roman La princesse de Clèves, la description des lieux environnant les personnages a-t-elle pour seule fonction de traduire les sentiments des personnages ou de montrer le poids de la société sur l'individu ? Vous répondrez à cette question en vous aidant d'exemples tirés du roman de Mme de La Fayette et de vos connaissances personnelles liées aux textes du parcours associé Individu et société.


Le rôle du poète est-il seulement de faire rêver le lecteur ?
Vous appuierez votre réflexion sur les textes du corpus, sur les oeuvres que vous avez étudiées en classe et sur vos lectures personnelles.

Remarque N°1 : vous remarquez que la consigne a 2 parties, qu'elle est liée à un objet d'étude précis (ici la poésie ou le personnage de roman ou l'argumentation) et que la seconde partie du sujet vous donne des pistes pour trouver vos idées et vos exemples.

Question n°2 : Où vais-je trouver la matière de la réponse ?
Comme le dit le sujet, vous devez utiliser votre connaissance de l'année grâce aux textes du corpus : oeuvre intégrale, lecture cursive, textes du parcours (lectures linéaires) et toutes vos connaissances issues des cours de français de première, de seconde ou même de votre culture personnelle...

Question n°3 : le programme de seconde aussi ?

Oui, par exemple pour le théâtre. Au XVIIe siècle, le théâtre classique français va poser les jalons de définitions dramatiques concernant la comédie et la tragédie, héritage de l'Antiquité mais aussi conception rigoureuse, soumise à des règles.
La bienséance et la vraisemblance.
La règle des 3 unités (lieu, temps et action principale de l'intrigue)

Pourtant, même au temps de Molière, les querelles existent pour définir ce que peut ou doit montrer une comédie. Et pour débattre des particularités et des difficultés des pièces dites "sérieuses" comparées aux pièces dites comiques...

Preuve par l'exemple !
(merci au site Tout Molière pour les liens "hypertextuels")


Molière : La Critique de L’École des femmes


Extrait de la scène 3

URANIE.- L’honnêteté d’une femme n’est pas dans les grimaces. Il sied mal de vouloir être plus sage, que celles qui sont sages. L’affectation en cette matière est pire qu’en toute autre ; et je ne vois rien de si ridicule, que cette délicatesse d’honneur, qui prend tout en mauvaise part ; donne un sens criminel aux plus innocentes paroles ; et s’offense de l’ombre des choses. Croyez-moi, celles qui font tant de façons, n’en sont pas estimées plus femmes de bien. Au contraire, leur sévérité mystérieuse, et leurs grimaces affectées irritent la censure de tout le monde, contre les actions de leur vie. On est ravi de découvrir ce qu’il y peut avoir à redire ; et pour tomber dans l’exemple, il y avait l’autre jour des femmes à cette comédie, vis-à-vis de la loge où nous étions, qui par les mines qu’elles affectèrent durant toute la pièce ; leurs détournements de tête ; et leurs cachements de visage, firent dire de tous côtés cent sottises de leur conduite, que l’on n’aurait pas dites sans cela ; et quelqu’un même des laquais cria tout haut, qu’elles étaient plus chastes des oreilles que de tout le reste du corps.


CLIMÈNE.- Enfin il faut être aveugle dans cette pièce, et ne pas faire semblant d’y voir les choses.


URANIE.- Il ne faut pas y vouloir voir ce qui n’y est pas.


CLIMÈNE.- Ah ! je soutiens, encore un coup, que les saletés y crèvent les yeux.


URANIE.- Et moi, je ne demeure pas d’accord de cela.


CLIMÈNE.- Quoi la pudeur n’est pas visiblement blessée par ce que dit Agnès dans l’endroit dont nous parlons ?


URANIE.- Non, vraiment. Elle ne dit pas un mot, qui de soi ne soit fort honnête ; et si vous voulez entendre dessous quelque autre chose, c’est vous qui faites l’ordure, et non pas elle ; puisqu’elle parle seulement d’un ruban qu’on lui a pris.


URANIE.- Ah ! voici l’auteur, Monsieur Lysidas : il vient tout à propos, pour cette matière. Monsieur Lysidas ; prenez un siège vous-même, et vous mettez là. (...)






SCÈNE VI LYSIDAS.- Madame ; je viens un peu tard ; mais il m’a fallu lire ma pièce chez Madame la Marquise, dont je vous avais parlé ; et les louanges, qui lui ont été données, m’ont retenu une heure, plus que je ne croyais.


ÉLISE.- C’est un grand charme que les louanges pour arrêter un auteur.


URANIE.- Asseyez-vous donc, Monsieur Lysidas ; nous lirons votre pièce après souper. (...)


LYSIDAS.- Ce n’est pas ma coutume de rien blâmer, et je suis assez indulgent pour les ouvrages des autres. Mais enfin, sans choquer l’amitié que Monsieur le Chevalier témoigne pour l’auteur, on m’avouera que ces sortes de comédies ne sont pas proprement des comédies, et qu’il y a une grande différence de toutes ces bagatelles, à la beauté des pièces sérieuses. (...) Je vous avoue que le cœur m’en saigne quelquefois, et cela est honteux pour la France.


CLIMÈNE.- Il est vrai que le goût des gens est étrangement gâté là-dessus, et que le siècle s’encanaille furieusement.


ÉLISE.- Celui-là est joli encore, s’encanaille. Est-ce vous qui l’avez inventé, Madame ?


CLIMÈNE.- Hé !


ÉLISE.- Je m’en suis bien doutée.


DORANTE.- Vous croyez donc, Monsieur Lysidas, que tout l’esprit et toute la beauté sont dans les poèmes sérieux, et que les pièces comiques sont des niaiseries qui ne méritent aucune louange ?


URANIE.- Ce n’est pas mon sentiment, pour moi. La tragédie, sans doute, est quelque chose de beau quand elle est bien touchée ; mais la comédie a ses charmes, et je tiens que l’une n’est pas moins difficile à faire que l’autre.



DORANTE.- Assurément, Madame, et quand, pour la difficulté, vous mettriez un plus du côté de la comédie, peut-être que vous ne vous abuseriez pas. Car enfin, je trouve qu’il est bien plus aisé de se guinder sur de grands sentiments, de braver en vers la Fortune, accuser les Destins, et dire des injures aux dieux, que d’entrer comme il faut dans le ridicule des hommes, et de rendre agréablement sur le théâtre les défauts de tout le monde. Lorsque vous peignez des héros, vous faites ce que vous voulez ; ce sont des portraits à plaisir, où l’on ne cherche point de ressemblance ; et vous n’avez qu’à suivre les traits d’une imagination qui se donne l’essor, et qui souvent laisse le vrai pour attraper le merveilleux. Mais lorsque vous peignez les hommes, il faut peindre d’après nature ; on veut que ces portraits ressemblent ; et vous n’avez rien fait si vous n’y faites reconnaître les gens de votre siècle. En un mot, dans les pièces sérieuses, il suffit, pour n’être point blâmé, de dire des choses qui soient de bon sens, et bien écrites : mais ce n’est pas assez dans les autres ; il y faut plaisanter ; et c’est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens.