vendredi 26 septembre 2014

Question de corpus « ti pa ti pa » en créole, « mora mora » en malgache, petit à petit en français (Pour garder le rythme du maloya et de la semaine Kabar Kreol)




Préambule : même si le sujet du bac écrit (EAF) portera sans doute sur 4 extraits, il est bon de s'entraîner à faire la comparaison de deux textes seulement, pour améliorer progressivement une méthodologie mariant l'esprit de synthèse et la capacité à mettre en relation des œuvres diverses.

Le corpus proposé est le suivant :

Lettre de Mme De La Fayette à la marquise de Sévigné

A Paris, le 14 juillet 1673,
Voici ce que j’ai fait depuis que je ne vous ai écrit : j’ai eu deux accès de fièvre ; il y a six mois que je n’ai été purgée : on me purge une fois, on me purge deux ; le lendemain de la deuxième je me mets à table ; ah, ah ! j’ai mal au coeur, je ne veux point de potage ; mangez donc un peu de viande ; non, je n’en veux point ; mais vous mangerez du fruit ; je crois qu’oui ; eh bien, mangez-en donc ; je ne saurais, je mangerai tantôt ; que l’on m’ait ce soir un potage et un poulet ; voici le soir, voilà un potage et un poulet ; je n’en veux point ; je suis dégoûtée ; je m’en vais me coucher, j’aime mieux dormir que de manger. Je me couche, je me tourne, je me retourne, je n’ai point de mal, mais je n’ai point de sommeil aussi ; j’appelle, je prends un livre, je le referme ; le jour vient, je me lève, je vais à la fenêtre, 4 heures sonnent, 5 heures, 6 heures ; je me recouche, je m’endors jusqu’à 7 ; je me lève à 8, je me mets à table à 12 inutilement, comme la veille ; je me remets dans mon lit le soir inutilement, comme l’autre nuit. Êtes-vous malade ? nani [A] : êtes-vous plus faible ? nani. Je suis dans cet état trois jours et trois nuits ; je redors présentement ; mais je ne mange encore que par machine [B], comme les chevaux, en me frottant la bouche de vinaigre ; du reste, je me porte bien, et je n’ai pas même si mal à la tête. (...)
Je dois voir demain Mme de Vill... ; c’est une certaine ridicule, à qui M. d’Ambres a fait un enfant ; elle l’a plaidé, et a perdu son procès ; elle conte toutes les circonstances de son aventure ; il n’y a rien au monde de pareil ; elle prétend avoir été forcée ; (...) La Marans est une sainte ; il n’y a point de raillerie ; cela me paraît un miracle. La Bonnetot est dévote aussi, elle a ôté son œil de verre ; elle ne met plus de rouge, ni de boucles. Mme de Monaco ne fait pas de même ; elle me vint voir l’autre jour bien blanche [C] ; elle est favorite et engouée de cette Madame-ci, tout comme de l’autre ; cela est bizarre. (...) Mme la comtesse du Plessis va se marier ; elle a pensé acheter Fresnes. M. de La Rochefoucauld se porte très bien ; il vous fait mille et mille compliments et à Corbinelli. Voici une question entre deux maximes :
On pardonne les infidélités ; mais on ne les oublie point. 

On oublie les infidélités ; mais on ne les pardonne point.
« Aimez-vous mieux avoir fait une infidélité à votre amant, que vous aimez pourtant toujours ; ou qu’il vous en ait fait une, et qu’il vous aime aussi toujours ? » On n’entend pas par infidélité, avoir quitté pour un autre ; mais avoir fait une faute considérable. Adieu, je suis bien en train de jaser ; voilà ce que c’est que de ne point manger et ne point dormir. J’embrasse Mme de Grignan et toutes ses perfections.
Notes : A. non. B. par artifice. C. bien poudrée.

Lettre de Mme de Sévigné à sa fille, à Coulanges, le 15 décembre 1670

« Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouïe, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue, la plus grande, la plus petite, la plus rare, la plus commune, la plus éclatante, la plus digne d’envie : enfin une chose dont on ne trouve qu’une telle dans les siècles passés, encore cet exemple n’est-il pas juste ; une chose que l’on ne peut pas croire à Paris (comment la pourrait-on croire à Lyon ?) ; une chose qui fait crier miséricorde à tout le monde; une chose qui comble de joie Mme de Rohan et Mme d’Hauterive ; une chose enfin qui se fera dimanche, où ceux qui la verront croiront avoir la berlue; une chose qui se fera dimanche, et qui ne sera peut-être pas faite lundi. Je ne puis me résoudre à la dire ; devinez-la : je vous la donne en trois. Jetez-vous votre langue aux chiens ? Eh bien ! il faut donc vous la dire : M. de Lauzun épouse dimanche au Louvre, devinez qui ? Je vous le donne en quatre, je vous le donne en dix ; je vous le donne en cent.
Mme de Coulanges dit : Voilà qui est bien difficile à deviner ; c’est Mme de la Vallière. - Point du tout, Madame. - C’est donc Mlle de Retz ? - Point du tout, vous êtes bien provinciale. - Vraiment nous sommes bien bêtes, dites-vous, c’est Mlle Colbert ? - Encore moins. - C’est assurément Mlle de Créquy ? - Vous n’y êtes pas. Il faut donc à la fin vous le dire : il épouse dimanche, au Louvre, avec la permission du Roi, Mademoiselle, Mademoiselle de..., Mademoiselle... devinez le nom : il épouse Mademoiselle1, ma foi ! par ma foi ! ma foi jurée ! Mademoiselle, la grande Mademoiselle ; Mademoiselle, fille de feu Monsieur ; Mademoiselle, petite-fille de Henri IV ; mademoiselle d’Eu, mademoiselle de Dombes, mademoiselle de Montpensier, mademoiselle d’Orléans ; Mademoiselle, cousine germaine du Roi ; Mademoiselle, destinée au trône ; Mademoiselle, le seul parti de France qui fût digne de Monsieur.
Voilà un beau sujet de discourir.

1Anne-Marie-Louise d’Orléans, duchesse de Montpensier, dite la Grande Mademoiselle.

Correction de la question de corpus sur deux lettres authentiques du XVIIème siècle


3 problématiques ont été proposées : (au choix bien sûr)

a) Comment la lettre permet-elle d'ouvrir un espace de liberté d'expression ?
b) Quelle est la place du destinataire dans ces lettres ?
c) Peut-on dire que ces lettres sont seulement des monologues ou recréent-elles un dialogue ?

Proposition d'introduction pour le sujet a) :

Si les romans épistolaires deviennent un phénomène de mode au XVIIIème siècle, ils le doivent en grande partie au succès des lettres authentiques de Mme de Sévigné, recopiées et lues au XVIIème, publiées dès le début du siècle des Lumières comme la gazette de la Cour.
Ainsi étudierons nous un corpus constitué d'une lettre datée du 15 décembre 1670, écrite par la célèbre épistolière à sa fille Mme de Grignan, et un second extrait de sa correspondance avec Mme De La Fayette, lettre du 14 juillet 1673 où cette fois elle tient le rôle de destinataire. Comment ces lettres permettent-elles d'ouvrir un espace de liberté d'expression ?
(l'annonce du plan est facultative pour la question de corpus)

Proposition de paragraphe avec 2 arguments et 3 citations pour le sujet a) :

Lorsque Mme de La Fayette décrit son quotidien avec « deux accès de fièvre » ou le détail scatologique « on me purge », elle prend la liberté de faire rentrer son destinataire, la marquise de Sévigné dans une intimité à la limite de la bienséance. Par cette lettre assez crue et précise dans les détails de toutes ses actions exprimées par une énumération de verbes au présent, nous apprenons que leur lien amical et leur féminité rendent possibles des descriptions qui seraient proscrites en société : « comme les chevaux, en me frottant la bouche avec du vinaigre » est une comparaison avilissante impensable à la cour.

Proposition de paragraphe avec 1 argument et 3 citations pour le sujet c) :

Dans un véritable dialogue, aucun auditoire n'accepterait d'attendre aussi longtemps que Mme de Sévigné veuille bien révéler l'identité des futurs mariés. « devinez qui ? » est une injonction interrogative qui s'adresse à sa fille mais c'est surtout une question rhétorique qui ralentit le moment de la révélation finale « Mademoiselle » avec un jeu sur la présence ou non de la particule « Mademoiselle de ... » permettant de différencier le titre de noblesse commun et le surnom de la duchesse de Montpensier.

Proposition de développement en 3 parties pour le sujet b) :

Tout d'abord, nous verrons que le destinataire est un confident de l'épistolière : le temps est rythmé par leurs échanges et le pronom « vous » apparaît dès la première ligne de chaque lettre :« depuis que je ne vous ai écrit » ou « je m'en vais vous mander » renoue le contact entre les amies ou entre mère et fille. Le choix du présent de narration par Mme de La Fayette pour énumérer toutes ses actions passées : « je me couche, je me tourne, je me retourne » les rapproche. Dans le même souci de garder le contact, Mme de Sévigné fait les questions et les réponses d'un dialogue fictif : « jetez-vous votre langue aux chiens ? » Sa fille ne peut répondre en direct et nécessairement donnera sa langue au chat, ici aux chiens, pour cette chasse au scoop.

Ainsi le destinataire peut aussi être réduit à un prétexte à la conversation et au bavardage : « Adieu, je suis bien en train de jaser. » avoue Mme de Lafayette. De même Mme de Sévigné conclut par « Voilà un beau sujet de discourir. » Elle ne se prive pas non plus pour insérer une forme de dialogue théâtral avec son entourage « Mme de Coulanges » puisqu'en réalité sa fille est réduite au silence, le temps qu'elle reçoive la lettre et puisse à son tour répondre par écrit.

D'ailleurs, la place du destinataire est explicitement dans l'avenir. A la fin de sa lettre, Mme de La Fayette demande conseil à la marquise de Sévigné :
« Voici une question entre deux maximes ». le destinataire devra apporter une critique littéraire. La forme épistolaire tisse des liens d'esprit entre les deux femmes et leurs amis communs « M. De La Rochefoucauld se porte bien ». De la même façon Mme de Sévigné attend un discours de sa fille en retour du « beau sujet » qu'elle vient de lui révéler : le mariage de la Grande Mademoiselle. Par conséquent, la dernière partie de ces lettres porte en germe la future réponse de son destinataire et la politesse ou l'affection reprennent leurs droits : « J'embrasse Mme de Grignan et toutes ses perfections ».

proposition de conclusion pour la question c)

Si la forme classique de la lettre est nécessairement un monologue qui appelle une réponse différée, le talent et la liberté de ces deux femmes du XVIIème siècle permettent au genre épistolaire de gagner en vivacité : dialogues théâtralisés, imaginaires, questions rhétoriques ou réelles font de leur correspondance une vraie œuvre littéraire presque interactive à la manière de nos modes de communication du XXIème siècle.





jeudi 29 mai 2014

"Les Colchiques" d'Apollinaire


« Les Colchiques »
Poème court de Guillaume Apollinaire, extrait du recueil Alcools publié en 1913.
Au début du recueil après « Zone » (le plus moderne des poèmes, comme un manifeste de la modernité, d'inspiration très urbaine, entre autre Paris) puis « Le pont Mirabeau » (le plus célèbre des poèmes courts, lui aussi parisien, pont réel, sur le thème de la séparation et du temps) enfin la suite des poèmes regroupés dans «  La chanson du Mal Aimé » (un des titres envisagés pour le recueil était Le roman du Mal Aimé) « Les Colchiques » est un poème inspiré cette fois, plus classiquement, par la nature, et par association d'idées, à l'amour qui apporte la peine. Ronsard déjà associait la nature et la séduction dans « Mignonne allons voir si la rose... » mais Apollinaire refuse l'image printanière pour lui préférer la fleur automnale : la colchique. Quelle est donc l'originalité d'Apollinaire dans la manière dont il s'inspire de la nature ? Un premier axe sera consacré à la façon dont il redonne vie à cette tradition poétique. Ensuite nous rechercherons ce qui donne son unité au poème. Enfin nous en tirerons une forme de définition de l'esthétique du Mal-Aimé.

A/ Tradition poétique revivifiée
1) tableau bucolique ( tradition nature et amour venue de L'Astrée : dans ce roman de D'Urfé, du XVIème siècle, donc avant la princesse de Clèves, le lecteur suit les amours idéalisées de bergers et bergères qui parlent comme la noblesse !)
les mots « pré » « vaches » campent le tableau champêtre.
La couleur automnale bien sûr vient déjà du titre. L'automne en métropole est aussi la saison où l'école recommençait (après l'été où les enfants aidaient aux moissons, dans une France encore rurale en 1913)
Le point de jonction entre comparant et comparé : « couleur de cerne et de lilas » permet de rapprocher la femme et la nature (transition) (colchique et lilas sont des fleurs qui peuvent être violettes comme les yeux cernés)
2) tradition de la métaphore filée : des fleurs qui sont des yeux
comparaison des yeux qui sont des fleurs vénéneuses (cf vers 1) ; tradition du XVIème associant femme et fleur ou faisant le blason des yeux (au XVIIème les précieuses appelaient les yeux « miroirs de l'âme »
humour du poète car Vie/vaches commencent par la même initiale. Donc si les yeux de la femme sont comme les fleurs qui empoisonnent les vaches, indirectement, le poète est comparé aux vaches ! « Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne » (lyrisme classique de l'alexandrin)

  1. tradition du lyrisme (rappel : le lyrisme vient -de l'expression de soi « ma vie » « tes yeux » : ici première personne du singulier suggérée par le déterminant possessif et le destinataire -de la musique comme thème « harmonica » « chante » « fracas »
      - ou de la musicalité des mots : assonance en « o » et 6 « an » v 13 et 14 ) et « on » « hoquetons » (vestes) dont le son fait penser à hoquet (bruit)
B/Unité du poème ?
1)organisation en escalier (longueur des vers) croissante 12/6/6/12 /Rythme qui oblige à ce lien enjambement  (lilas/y fleurit) puis césure avant le nouveau sujet « tes yeux sont... » : rythme très moderne
    organisation des strophes : la première strophe compte 7 vers, puis 5 vers, enfin 3 vers pour la dernière strophe (tercet) : donc cette fois la progression est décroissante.
    Énonciation : strophe 1 « ma » « tes » indiquent des personnages puis on assiste à la disparition de la1ère personne en strophe 2 (reste juste « tes » et la 2 ème personne disparaît aussi à la strophe 3 (reste le gardien... même les vaches partent)
    organisation en escalier aussi de la syntaxe par ajouts: -GN avec C du nom, (« couleur de cerne » « filles de leurs filles » ou GN avec relative (« les colchiques qui sont comme des mères » « tes paupières qui battent » .
  1. effets de ralenti : (vers 7)
    les répétitions ralentissent le rythme : « qui » « comme » « battent » « filles »
    le vocabulaire suggère le ralenti : « lentement » « tout doucement » « lentes et meuglant »
C/Esthétique du Mal-Aimé
1)Apollinaire a souligné la relation entre lui et l'automne par la formule « Mon automne éternelle ô ma saison mentale » (« Signe ») ce thème de l'automne est présent dans plusieurs poèmes d'Alcools, (cf le poème titré : « Automne » où l'on retrouve : « Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux/ Et son bœuf lentement... » en particulier celui-ci, associé à l'amour dangereux ou malheureux ou douloureux : »Et s'en allant là-bas le paysan chantonne/ Une chanson d'amour et d'infidélité »
2)la menace latente « vénéneux mais joli » « cerne » (connotation : maladie ou fatigue) « s'empoisonne »
« au vent dément » « les paupières/qui battent » (cf poème « l'automne » : « l'automne a fait mourir l'été »
3) une rupture sublimée par le paysage et en même temps cocasse :
« abandonnent/ pour toujours ce grand pré mal fleuri »
c'est comme si l'image s'était retournée en dernière strophe, les vaches sont féminines par opposition avec « le gardien du troupeau ». On avait la même confusion et inversion en strophe 2 « des mères/filles de leurs filles »

On peut donc conclure que le poète choisit des thèmes classiques bucoliques : dans la nature, miroir de nos sentiments ou bien élégiaques (poème sur la perte) Ce poème est ambivalent Est-ce un poème d'amour ou de rupture ? En effet, le départ des vaches est une image dérisoire de la séparation ; la description est faite au présent de narration ou au présent d'éternité ? Le grand pré « mal fleuri » est aussi le mal aimé.... (cf biographie : en 1912, rupture avec Marie Laurencin, peintre)

samedi 12 avril 2014

Centenaire de la Grande Guerre : La dernière lettre de mon arrière-grand père

Préambule = un album d'images d'art : pourquoi et comment commémorer


Camblain-L'Abbé1, 7 mai 1915

Chère femme, chers parents

Tes deux dernières lettres m'ont été données, hier soir aux tranchées, l'une était datée du 1er et l'autre du 3. Contrairement à la mienne, votre correspondance me parvient très régulièrement ; je vous ai envoyé avant-hier ma photographie accompagnée d'un petit mot ; aujourd'hui, je profite que j'ai un peu de temps pour vous écrire plus longuement.
Nous avons quitté les tranchées, hier soir, nous sommes revenus cantonner où nous étions précédemment. Nous sommes tous bien fatigués ; la pluie tombée ces jours derniers, avait rendu le séjour à la tranchée pénible, et le passage dans les boyaux, très difficile. Quand donc finira cette vie de misère ? Il faut vraiment avoir l'âme chevillée dans le corps pour y résister.
Les Boches2 nous ont envoyés pas mal d'obus, hier soir, mais comme à l'ordinaire, je me suis tiré indemne de cette pluie de fer. A quelques mètres de moi, deux cuisiniers ont été blessés : mon camarade Meunier a été blessé à la fesse mais il n'y a rien de grave, à ce qu'il paraît.
On s'attend d'un instant à l'autre, à marcher de l'avant. Ce sera sans doute très dur mais tant pis, il faut qu'on en finisse ; il y a assez longtemps que cela dure. Que cela ne vous tourmente pas trop, chers aimés. Dieu qui jusqu'ici m'a protégé, grâce à vos bonnes prières, ne m'oubliera pas au dernier moment.
Si je dois succomber, ma dernière pensée sera pour vous ,et Dieu, je l'espère, m'accordera le temps d'implorer son pardon.Les peines, les souffrances morales et physiques endurées depuis 9 mois serviront au rachat de mes fautes. Tes photographies et celles de Bébelle3, jointes aux images du Sacré-Coeur, que je porte constamment sur moi, me donneront le courage de tout supporter avec patience.
Pardonnez-moi, chère femme et chers parents d'évoquer sur ma lettre d'aujourd'hui, de si tristes pensées. Je comprends que j'ai tort, et que j'aurais mieux fait de m'abstenir de vous les communiquer, mais je veux que vous ayez la consolation, si je dois mourir sans vous revoir, de savoir que je suis mort en chrétien et en homme de cœur.
J'apprends avec plaisir que vous avez bien avancé l'ensemencement 4; vous avez bien des maux, chers aimés, et avec tous vos maux, vous êtes encore continuellement en soucis de Joseph et de moi.
Continuons d'être courageux comme par le passé, ayons confiance en Dieu, il ne nous abandonnera pas.
Continue, sans te décourager, bien chère femme, à faire prier ma chère petite Bébelle à mon intention. Dieu ne restera pas sourd aux prières de ce cher petit ange et lui rendra son papa.
Je vous quitte, bien chers aimés ; à bientôt, je l'espère, d'autres nouvelles. Recevez mes amitiés bien sincères, avec tous mes meilleurs baisers.
François

J'ai reçu hier soir une lettre de Joseph ; il est en ce moment-ci en Belgique ; il me dit qu'il marche souvent la nuit avec son ambulance ; je ne pense pas, malgré cela, qu'il soit bien exposé. Je lui ferai réponse, dès que j'aurai le temps.
Fais part de mes amitiés chez nous, à tout le monde. J'ai appris avec beaucoup de peine qu'Eugénie était tombée malade de nouveau, c'est aussi bien souvent son tour.
Faites part également de mes amitiés aux parents de Laives5, ils vont dire que je les oublie car depuis longtemps, je ne leur ai pas écrit ; je leur donnerai de mes nouvelles dès que j'aurai un petit moment.

François Laborier, 1ère classe, fut tué deux jours après, par « coups de feu reçus au combat » le 9 mai 1915 à Sachez. C'est sa dernière lettre.

1Ville du pas-de Calais, comme Sachez.
2Mot familier pour « Allemands »
3Surnom de sa fille Isabelle, 2 ans.
4Ses destinataires sont agriculteurs et doivent semer à cette saison.
5Ville de Saöne et Loire

mercredi 2 avril 2014

Pour la semaine du Centenaire de la guerre débutée en 1914 : récapitulatif des recherches en seconde

Nom Prénom corps date du décès lieu du décès lieu de naissance date de naissance grade circonstances


Adam de Villiers Gabriel marie antoine armand bataillon colonial du Maroc 27/04/25 Belgique
24/08/91
tué par l'ennemi

Armoet Charles 52RIC 27/08/18 doubs hôpital
1896 2ème classe Maladie

Brézé Joseph Ernest 74 R artillerie lourde grande puissance 17/12/17 Oise (hôpital)
30/05/95 2ème classe Maladie

Celerine Saint Lys Emmanuel 160 Ri 20/03/18 Marseille (hôpital auxiliaire 2) Ste Marie 05/07/91
Maladie contractée en service

Chapelain (Camoudredy) Emile(Padrateloy) 118RAC 23/10/16 Grèce, front d'Orient (Klesfina le bas) Ste Marie 06/02/89 2ème classe tué par l'ennemi

CLAUDE Raphaël 23 colonial 23/08/1917 Craonne Aisne 974 1894 2ème classe tué au combat

Conteur Eugène 6ème gr artillerie à pied 07/06/17 Alsace Ste Marie 20/05/93 2ème classe blessures

Darid Joachim bataillon emyne 10/03/16 madagascar
1887 2ème classe Maladie


Dary J.Baptiste 95 28 RI 29/10/17 Hôpital 68 de Lyon ST Leu 11/03/96 Classe 1914 maladie attrapée au service


De pindray de sainte croix d'ambelle de tuzie Arnaud 1Ri 21/12/14 Somme
1888 sergent tué à l'ennemi


De Peindray d'Ambelle
2Ri 05/08/18 Somme
1888 Caporal tué à l'ennemi

(Ethève) Joseph fabien 22ric 20/10/18 Ardennes (ambulance)
1895 2ème classe blessures

Fontaine Jean Joseph Ri groupe « créole » 23/01/18
St Joseph 14/11/94
Bronchite Pulmonaire

Fouilloux Gustave


Paris

tuberculose (gazé) Ar-ar-gd père
Gabay (Garbays) Gabriel


Sauméjan 21/09/69

Marié(16/5/88ST MARTIN) à Jeanne Courregos née le 3 mars 72 à St michel de Ca (33)

Gourville Adrien (Georges) 112è RI 25/01/18 VAR : Hôpital Toulon Ste Marie 31/01/00 2ème classe MCS maladie
17 ans
Grondin Enock Philippe
27/06/15 Hôpital de Toulon St Joseph 22/02/94
rougeole


Huet Albert 365 ri 11/04/19 Alpes maritimes Hôpital
1896 2ème classe Maladie


Huet Eugène bataillon colonial diégo Suarez 06/04/18 madagascar
1898 2ème classe Maladie


ICHIZA René
30/09/14 Souain Marne 51 Ste Marie 10/03/92
suites blessures de guerre

Laborier François 21 bataillon chasseurs à pied 09/05/15 Souchez pas de calais Chapelle de bragny 08/06/82 1ère classe coups de feu reçus au combat une veuve, une fille 32 ans
Mada Romain









Malbrouck Emilien (dit manbélé) 2 RMA (régiment de marche d'Afrique) 08/07/15 navire hospitalier Bretagne II : inhumé au Havre Ste Marie 16/07/92
suites blessures de guerre


Malinga Olivier 49 Ri 21/01/19 Alpes maritimes Hôpital Ste Marie 1881
Maladie contractée en service


Malo Raoul 179 172 R inf. 19/10/18 Route nationale Paris (Aisne) 974 10/02/96 2ème classe tué à l'ennemi


Maloto Valérie Rosaire 16rég.infanterie 01/10/18 hôpital Francheville, Marne St Denis 19/02/91
maladie imputable au service : grippe infectieuse


Maloto henri









Payet Bastien Louis 56ème régiment infanterie coloniale 28/10/16 Serbie St Joseph 03/01/94
tué à l'ennemi


Renaudière Tommy (Thierry)
19/07/18 Saïgon


maladie


Simatave (écrit Simataye sur le monument) Charles 22ric 12 11 18 Marseille (hôpital des Fleurs)
1898 2ème classe grippe
20 ans
Soupin Joseph 77R artillerie lourde 14/03/18 Hopital mixte (EURE) St Denis 19/08/189996 2ème classe pneumonie

Villèle (de) Yves Ric Maroc 21/09/18 Oise
1896 aspirant tué à l'ennemi


Zafinedravoul paul
16/09/19 Hôpital de Bourg (ain) Ste Marie, recruté à Ste Suzanne 15/12/98
tuberculose pulmonaire


Mieux que "Qui veut gagner des millions" ! Les questions pendant l'entretien oral du bac :




le jour de l'oral du bac, précisément pendant l'entretien, il arrive que l'on se trouve confronté à des questions... que l'on n'avait pas prévues.
Voici donc les questions que vous ne vouliez pas entendre et les réponses que vous auriez aimé savoir :
Question 1 : Beaumarchais, espion et trafiquant d'armes : oui, mais pour le compte de quels pays ? (tirade de Figaro)

« The » réponse : espion pour le roi de France, en Angleterre et trafiquant d'armes en Amérique pendant la guerre d'indépendance (il avait été envoyé officiellement mais a réalisé des profits personnels)

A propos de Beaumarchais, un film porte son nom, joué par Fabrice Luchini, cela peut être utile aussi pour se représenter concrètement le XVIIIème siècle, siècle des Lumières (de l'esprit, donc des philosophes.

Question 2 : Connaissez-vous le mythe du bon sauvage ? ( Supplément au voyage de Bougainville de Diderot)

« The » réponse : le mot sauvage représente ici les personnes qui n'appartiennent pas à L'Ancien Monde, c'est à dire l'Europe. Donc, par exemple les Tahitiens de Diderot mais cela peut aussi être les Indiens d'Amérique de Montaigne (XVIè).
Tous ces écrivains montrent « le sauvage », donc non civilisé, façon européenne, comme une personne NATURELLEMENT BONNE, non corrompue, non abîmée par nos défauts d'Européens (à savoir la guerre, la religion intolérante de l'époque, l'argent, le goût du pouvoir, le désir de posséder....)
Cela va donc avec le mythe de la Mère Nature, bonne et bienveillante.

Question 3 : Qui est la femme aimée par Baudelaire dans l'Invitation au voyage ?

« The » réponse intelligente serait : la femme idéale, la femme rêvée qui constitue un voyage symbolique. Mais imaginons que votre jury soit plus terre à terre et veuille un nom précis !

Ce poème appartient à la première partie des Fleurs du Mal et fait partie de la dizaine de poèmes inspirés par une comédienne MARIE DAUBRUN, appelée aussi La belle aux cheveux d'or, du nom d'une pièce qu'elle avait jouée.

Question 4 : Pourquoi François Villon est-il en prison quand il écrit La ballade des pendus ?

Là encore, la réponse n'est pas si intéressante que cela ! En effet, la vie de Villon est si mystérieuse (cela date du Moyen Age) qu'on ne sait même pas quand il est mort. Son nom a tout simplement disparu. Il y a plusieurs hypothèses : bataille au couteau et autodéfense ayant entraîné la mort de son agresseur ; d'autres historiens indiquent un cambriolage.
Il est plus intéressant de souligner que Villon est devenu un mythe littéraire (et musical car le mot ballade avec 2 L désigne un type de poème avec refrain ou une chanson, pas une promenade!!!)
Du coup, on garde de lui son côté poète dissident, un « voyou littéraire », comme Baudelaire le côté poète maudit (dans L'Albatros par ex).



vendredi 28 mars 2014

Une liste de 20 titres pour les élèves de seconde qui voudraient préparer une première Littéraire :



Lisez dix de ces livres avant la fin du 3ème trimestre pour savoir si, oui ou non, la littérature vous plaît. Et gardez les dix autres pour le temps des vacances de juillet / Août :
Quel que soit votre choix d'orientation, vous devrez travailler sur le personnage de roman : aussi faites une fiche sur les personnages importants après chaque lecture romanesque.

Les Romans :

XXIème siècle
Eldorado de Laurent Gaudé ou Neige de Maxence Fermine

Neige écrit par Maxence Fermine




XXème siècle
L'oeuvre au noir de Marguerite Yourcenar
La vie devant soi de Romain Gary (Emile Ajar)

XIXème siècle
Salammbô de Gustave Flaubert
La peau de chagrin d'Honoré de Balzac

XVIIIème siècle :
Manon Lescaut de l'abbé Prévost
Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos



Littérature étrangère :
Russie
Le maître et Marguerite Mikhaïl Boulgakov

Japon
Naufrages de Yoshimura ou Le marin rejeté par la mer de Mishima



Suède
Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Jonas Jonasson ou Le mec de la tombe d'à côté de Katarina Mazetti

Italie
Si c'est un homme de Primo Levi
Novecento pianiste ou Soie d'Alessandro Baricco

GB
De grandes espérances ou Oliver Twist de Charles Dickens
Le portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde

USA
Gatsby le Magnifique de Scott Fitzgerald

Côte d'Ivoire
Allah n'est pas obligé d'Ahmadou Kourouma




Le théâtre
Huis clos de Jean-Paul Sartre
Zoo ou l'assassin philanthrope de Vercors

Nouvelles 

La guerre est déclarée et autres nouvelles d'Annie Saumont (éditions GF)
Fables de Stevenson (USA) (éditions rivages poche)









mercredi 26 mars 2014

Quand La BD est réaliste : Jacques Tardi VS Rimbaud


Le Dormeur du Val D'Arthur Rimbaud

C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.


Octobre 1870



Comment les horreurs de la guerre sont-elles mises en relief par ces auteurs, tout en conservant de l'humanité, voire de l'espoir ?

vendredi 21 février 2014

Fiche méthode : la (ou les) question(s) de corpus.



Vous avez 4h en tout à l'écrit : Cette première partie de l'épreuve écrite doit vous occuper au maximum 1H15 (pour les séries L,  S et ES sur 4 pts)  ou 1H30 (pour les séries STMG sur 6 pts) ou  de façon à garder suffisamment de temps pour la rédaction qui suivra (la 2e partie sur 16 ou 14 pts).

C'est un exercice qui vise à évaluer vos qualités de compréhension des textes et votre capacité à synthétiser une réponse (maximum un recto/verso).
Le but est la comparaison des textes composant le corpus (3 à 4 textes dans un seul objet d'étude, avec parfois une illustration)

Concrètement :
A/une introduction rapide en 3 étapes mais 1 seul paragraphe
l'étape 1 : on présente : titres de œuvres, auteurs et époques en évitant les répétitions de ce qui est semblable.
L'étape 2 : on peut formuler une problématique rappelant le thème commun
L'étape 3 : le plan est donné par le ou les questions que l'on rappelle.
Erreurs fréquentes : vocabulaire répétitif, orthographe des auteurs et titres, titres non soulignés, questions non exprimées

B/Un développement où chaque partie répond à une des 2 questions mais en abordant plusieurs textes.
S'il n'y a qu'une seule question,
 on peut faire 2 parties : points communs et différences

Erreurs fréquentes dans le développement : il ne faut pas oublier un des textes. Ne pas faire une étude détaillée comme pour un commentaire composé. Enfin, penser à citer au moins une fois chaque texte (courte citation bien choisie pour accompagner une réponse à une des questions).

C/ Une courte conclusion qui :
résume l'essentiel, donne une ouverture éventuellement sur un texte qu'on aurait pu ajouter à ce corpus.
Erreurs fréquentes : oublier la conclusion ou refaire la même chose qu'en introduction.

Dernière remarque : Ne rédigez pas votre brouillon, mais notez vos idées dans un tableau qui prépare le plan ; le temps gagné vous permettra de prendre 5 mn pour vous relire.
Exemple de brouillon avec 2 questions :
Notes de lectures
pour :
Partie 1 du développement pour répondre à la première question Partie 2 du développement pour répondre à la 2nde question
Le texte A Je note au moins un argument et une citation en réponse à la question idem
Le texte B idem idem
Le texte C idem idem

Ou Exemple de brouillon pour une seule question :
Notes de lectures
pour :
Partie 1 du développement pour
les réponses communes aux textes ou à certains textes
Partie 2 du développement pour les réponses différentes selon les textes
Le texte A Je note au moins un argument et une citation en réponse... Idem (une seule case peut être vide par colonne)
Le texte B idem idem
Le texte C idem Idem